Film

Les illusions perdues

Marc Auburn

24 octobre 2021

Ce film français sorti récemment est une magnifique adaptation des textes d’Honoré de Balzac.


Dans le Paris des années 1810, on assiste à l’ascension puis à la chute d’un jeune poète venant de province. La pureté première du héros ne dure que jusqu’à sa confrontation avec l’univers social qu’il a choisi d’explorer. Qu’a-t-il réellement choisi ?


La mise en scène de qualité est renforcée par des acteurs remarquables, on passe un très bon moment sans s’ennuyer une seconde, et au-delà de cela, on en ressort enrichi. C’est un appel à l’intelligence que chacun de nous a au fond de soi, plus ou moins enfouie dans la lutte effrénée pour la survie biologique.


Nous n’allons pas ici nous improviser critiques de cinéma, mais cette fresque sociale du Paris de la première partie du 19ème siècle annonce notre présent, 2 siècles plus tard.


Le monde d’Honoré de Balzac est une société en décadence, en décomposition. Il n’est pas identique à celui d’aujourd’hui, cependant il l’annonce, à bien des égards : grossière manipulation de l’opinion, jeux de pouvoir, corruption généralisée, banquiers, trahisons, médiocrité, illusions de contrôle de chaque groupe humain sur sa propre destinée, voici l’histoire humaine de ces derniers millénaires, ce qu’Honoré de Balzac nomme LA COMÉDIE HUMAINE.


L’histoire est un cycle, une spirale où chaque épisode ressemble au précédent sans être tout à fait le même. L’intelligence, le discernement ne peuvent pas faire l’économie de la mémoire.


Durant ce film, le Voyageur se reconnait dans son immersion dans le terrible monde ‘’humain’’ de cette petite planète. Être plongé dans la lutte pour la survie, oublier parfois ce que l’on est, ne plus vouloir savoir, ne plus vouloir se souvenir.


La pureté reste illusoire tant qu’elle n’a pas été confrontée à la boue, au marécage, à la corruption des mondes physico-énergétiques. C’est en effet leur nature même que de provoquer le rêve, l’errement, la recherche aveugle d’un absolu qui tel l’horizon, recule sans cesse à mesure de notre marche.


Nous sommes des enfants perdus qui luttons pour la survie du corps, sans mémoire, sans liberté, avec une conscience minuscule, cristallisée dans un univers d’un millimètre cube.


Et pourtant… Amis Voyageurs, et ceux qui ont de la Mémoire, n’avez-vous pas vécu maintes fois, peut-être depuis le tout début de votre vie actuelle, cette envie prodigieuse de vous retirer du monde humain, fut-il parfois confortable, sécurisant et rassurant, et de vous envoler ?


Pas seulement quand les choses vont mal, mais Y COMPRIS quand elles vont très bien !


Une douce soirée d’été entre amis, un bon moment passé en société, et la nostalgie nous envahit, le souvenir d’être autre chose, bien plus qu’un proto-humain sur une planète sans importance. Alors on s’isole, juste quelques minutes, on se met à l’écart, on regarde le ciel, les étoiles, et la pulsion d’envol, de liberté nous prend. C’est plus fort, plus délicieux que n’importe quelle envie physique, y compris sexuelle ou amoureuse, c’est bien plus que tout ce qu’il y a dans le marécage.


On reste cependant rivé, collé dans le corps ; ne pas voler, ne pas être libre est une sensation terrible pour celui qui a de la mémoire. Mais c’est aussi une chance prodigieuse, un bonheur incomparable, que de savoir qui on est, et où l’on est, de le savoir réellement.


Le moment viendra où je vais reprendre ma liberté, même pour un moment, quitter ce corps, cet univers et explorer, me noyer à nouveau dans l’infini ; peut-être cette nuit même quand le corps sera endormi.


Le voyageur est comme un bouchon qui flotte sur l’océan epsilon. Il est à la fois dedans, mouillé par-dessous, et sec au-dessus. Il est à la frontière, pas vraiment dans le monde physique, pas vraiment en dehors.


C’est à la frontière qu’il retrouve la mémoire, c’est là qu’il voit que la seule pureté possible est celle de la Mémoire et du Voyage. Être Ici, dans le monde bio-énergétique, et Ailleurs, dans l’infini, en même temps.


Le reste est illusion dont la perte est une libération.


Médias archaïques, mondes politique et religieux, pour que ces abominations glissent sur nous, nous devons retrouver la MEMOIRE. Pas l’histoire des autres, fussent-ils aussi doués pour la raconter qu’Honoré de Balzac, mais NOTRE HISTOIRE personnelle, depuis 100 000 ans, depuis 10 millions d’années et plus. Pas de vagues impressions, pas de choses imprécises, quasi imaginaires ; mais retrouver vraiment la mémoire, avec des détails, une infinité de détails.


Il n’y a pas d’autre liberté que de voyager HORS des mondes epsilon. Sortir de l’océan local du rêve, fut-il ‘’éveillé’’, sortir des drogues, de la bouillie internet où tout le monde risque de se perdre s’il n’a pas de véritable mémoire, pas de réelle intelligence, pas d’authentique discernement.


L’expérience directe de la réalité n’est pas un des moyens, il est le seul.


Marc Auburn